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Mildiou 2024 et biodynamie – La diversité pour accompagner !

CONSEILS

La prophylaxie et le cuivre

Les différentes actions prophylactiques

Le premier soin est de ne pas créer les ambiances favorables à la maladie, c’est la prophylaxie :

  • ne pas laisser les pieds dans l’herbe
  • diminuer le couvert sous le rang en en laissant suffisamment pour éviter que les gouttes d’eau arrivant au sol ne projettent des œufs sur le feuillage (effet splashing)
  • l’épamprage précoce évite les contaminations
  • l’épaisseur de feuillage au niveau des raisins joue un rôle d’aération –> il faut nettoyer le cep de bonne heure, lever rapidement pour éviter la forme de harpe au niveau des grappes ; si on peut, on enlève les entre-cœurs voire on pratique un léger effeuillage pour laisser la pulvérisation bien pénétrer et aérer la zone de grappe
  • plus tard, après séchage du bourgeon terminal, écimer pour couper les jeunes feuilles plus sensibles, cela équivaut à un traitement
©LaurentDreyfus

Les différentes formes de cuivre

Le cuivre est notre outil principal pour prévenir ces attaques, malheureusement il n’est que préventif et, pour les formes habituelles, facilement lessivables. Il faut jouer avec les doses et ses différentes formes. On le trouve principalement sous trois formes :

Calendrier des différents traitements en cuivre, décoctions/tisanes de plantes et silice de corne

🍁 En automne : l’oxyde cuivreux

A l’automne, lorsque l’année précédente a connu une attaque de mildiou, il est intéressant de passer 100 g / ha d’oxyde cuivreux juste avant la chute des feuilles à cela diminue la quantité d’œufs émis au printemps suivant, les œufs de mildiou se formant au sol dans le lit de feuilles mortes.

🌿 Au départ de la végétation : prêle et cuivre soutenus par le soufre et l’ortie

La décoction de prêle

2 à 5 jours avant la pleine lune de mars voire de février, on épand une décoction de prêle au sol pour retarder la première contamination de mildiou.
Au démarrage de la végétation, il faut agir tôt pour éviter que les feuilles tendres soient contaminées. On épand une décoction de prêle au stade « pointes vertes » (elle peut selon les régions et le millésime correspondre avec la précédente).  

Attention : lorsque le mildiou est élevé on évite de doubler ou tripler les bouses de corne de printemps, car elles stimulent la vigueur. Un seul passage de bouse de corne est suffisant pour favoriser la vie du sol, sans pour autan trop stimuler la vigueur de la vigne. Le passage de bouse de corne doit être suffisamment éloigné de celui la prêle, une quinzaine de jours de décalage est conseillé.

Le mélange cuivre-soufre + décoction prêle-ortie

Le mélange cuivre-soufre prévient également au stade une à deux feuilles étalées les attaques de black rot. On travaille au début avec de petites doses 50 à 75 g / ha et de préférence avec de l’hydroxyde de cuivre additionné d’un mouillant et une dose de 2 kg / ha de soufre. On ajoute à la bouillie une décoction de prêle de quarante minutes dans laquelle on a ajouté des orties au moment de couper le feu, on peut laisser cette décoction fermenter quelques jours. L’éclosion des œufs de mildiou est freinée par cette préparation.

L’idéal est d’utiliser des panneaux récupérateurs lorsque c’est possible car il y a peu de surface à couvrir en début de saison. Avec ce peu de surface à traiter, il faut de petits débits bien ciblés pour couvrir les sarments et les jeunes feuilles en les mouillants suffisamment sans que le mélange ne goutte.

En cas de lessivage

Renouveler ce traitement dès que celui-ci est lessivé (10 min d’eau lessivent 100 g de cuivre) ou qu’il y a 10 centimètres de pousse. On augmente les doses de cuivre en fonction de la surface de végétation. En période très pluvieuse, on mélange l’hydroxyde et la bouillie bordelaise qui est moins rapide à agir mais tient mieux au lessivage. On maintient la prêle jusqu’à la fleur, sans ortie, si la vigne a trop d’eau.

🌺 À partir du stade 4/5 feuilles : silice de corne, tisane de plantes et HE

La silice de corne

On passe assez tôt une silice de corne à partir de quatre à cinq feuilles étalées et on peut en passer plusieurs avant fleur. Elles freinent la vigueur, apportent un effet lumière, mais aussi elles épaississent les tissus qui résistent mieux aux attaques. On peut y ajouter de la valériane pour compenser le manque de chaleur. Si on ne peut passer plusieurs silices avant fleur, pour compenser le manque de lumière, on augmente la dose à 6 voire 8 g / ha surtout si la vigueur est importante.

La synthèse d’antioxydants stimulée par les tisanes de plante est encore augmentée par des passages de silice ; même leur action est renforcée par cette préparation qui change l’ordonnancement de ces molécules. On peut passer de la silice de corne avant la fleur, à la nouaison, au stade petit pois, à la fermeture de la grappe, puis lors de la véraison : en début véraison pour les blancs, à mi-véraison pour les rouges. Éviter seulement les gros stress hydriques, ce qui n’est pas le cas en général lorsqu’on est en période mildiou.

L’oxyde cuivreux

Si la météo ou l’état des sols ne permettent pas de couvrir à temps, à partir de cinq feuilles étalées on peut ajouter au mélange bouillie bordelaise-hydroxyde soufre une petite quantité d’oxyde cuivreux (Nordox) qui résiste bien au lessivage. Mais attention son action n’est effective qu’au bout d’un certain temps, le cuivre devant se transformer avant d’être efficace, on ne peut donc pas l’employer seul.

NDLA Je n’aime pas trop ce produit, qui, si on le passe tard, amène des résidus de cuivre dans les cuves, mais en année spéciale lors de pluies abondantes, il faut s’en accommoder. Heureusement les levures naturelles émettent souvent de l’hydrogène sulfuré qui précipite le cuivre sous forme insoluble. Mais, quelquefois, s’il n’est pas éliminé, il gêne alors la fermentation.

Un vaste choix de tisanes          

A partir de la fleur, on ajoute différentes tisanes suivant l’effet recherché et l’état du vignoble : osier, reine des prés, camomille, achillée… Mais aussi en cas d’attaque avérée, on passe à la bourdaine, à l’écorce de chêne (après nouaison). Il est bon de varier les tisanes le plus possible. La vigne émet plus de défenses si elle rencontre des tisanes de plantes variées, mais on ne mélange pas plus de trois plantes à chaque traitement.

La prêle est moins efficace à partir de la fleur, en cas d’attaque on passe à une décoction de bourdaine de 20 minutes à 200 g / ha. À partir du stade grain de poivre, on peut passer une décoction d’écorce de chêne à 100 g / ha en alternant les deux tisanes jusqu’à véraison, passées assez tôt, cela diminue les risques de rot brun. En complément, on peut ajouter aux pulvérisations soit 200g de sucre par hectolitre, soit de l’Armicarb, ou autre préparation à base de bicarbonate, cela égare le champignon qui ne reconnait pas la composition de la feuille, la sucrosité ou l’acidité de celle-ci étant modifiée.

En fin de saison, protéger du mildiou mosaïque les feuilles nourricières en passant de la prêle après l’arrêt du cuivre. Celle-ci redevient assez efficace en fin de saison. Cela permettra une bonne maturation, surtout pour les cépages tardifs.

Les huiles essentielles d’agrumes

Lorsque les premières taches apparaissent, il est important de les sécher si possible au plus vite pour empêcher les contaminations secondaires. Pour cela on utilise des préparations à base d’huiles essentielles d’agrumes à raison d’un millilitre par litre d’eau diluée dans l’huile de colza (environ 10 ml), additionnées de savon liquide à mélanger intimement avant de les ajouter à l’eau (éviter de toucher ou de respirer certaines huiles, ne pas les utiliser dans le mois précédent la vendange, ce sont des produits puissants à n’utiliser en biodynamie que dans les cas graves).

Ce mélange doit être passé seul de préférence en soirée. Il existe des mélanges tous faits : Prévam, Limocide, etc. Attention de diminuer les doses indiquées d’un quart et de ne pas mélanger au soufre pour éviter les brulures. Ces huiles agissent mieux en préventif et gênent aussi certains insectes. On utilise également de l’huile essentielle de sarriette ou d’origan, de tea tree.

En conclusion : pas d’action unique miracle, mais une somme de gestes à mettre en œuvre avec la biodynamie en toile de fond

Aucune de ces actions n’est suffisante à elle toute seule, c’est une somme d’actions qui s’avère efficace. On dépasse alors souvent les doses autorisées de cuivre, mais en général de telles années des dérogations sont décrétées.

Les silices freinent réellement les dégâts en épaississant les tissus et en augmentant les défenses de la vigne. Pierre Masson suggérait de viser la zone de grappe avec cette préparation.

Je constate que les tisanes et les silices utilisées en biodynamie permettent de limiter les pertes de récolte. Les domaines en biodynamie de longue date, résistent mieux et les défenses de la vigne augmentent au fur et à mesure de la pratique. Dans des vignobles passés en plusieurs phases en biodynamie, on peut constater que les attaques de mildiou  à traitement égal sont moindres sur les premières parcelles passées en biodynamie par rapport aux dernières.

©LaurentDreyfus

Par Jacques Fourès, conseiller viticulture et administrateur au MABD

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